"Je veux que les handicapés passent de bonnes vacances !"

France Dimanche
"Je veux que les handicapés passent de bonnes vacances !"

Annette Masson, 59 ans, présidente de “Tourisme et handicaps”, rêve de rendre accessibles aux accidentés de la vie tous les hôtels, restaurants, musées de France. Pour qu’ils puissent passer de beaux moments pendant leur temps libre !
 

« Il n’y a pas de raison qu’on n’arrive pas à vivre ensemble ! Demain, je peux moi aussi être en situation de handicap suite à une maladie ou à un accident. Cela peut arriver à chacun de nous... Cela me révolte de constater que seuls 10 % des hôtels en France sont accessibles aux personnes handicapées. Pourtant, la loi de 1975 oblige les hôteliers à équiper leur établissement d’une rampe d’accès, d’un ascenseur, de chambres adaptées permettant l’accès en fauteuil roulant.
Mais comme aucune sanction n’est infligée aux contrevenants, ils se fichent de respecter la réglementation. Ce qui est inadmissible, c’est qu’on ne considère pas les personnes ayant un handicap (moteur, visuel, auditif, mental) comme des clients à part entière !

"Cela me révolte de constater que seuls 10 % des hôtels en France sont accessibles aux personnes handicapées."

Le problème est identique dans les restaurants. Le plus souvent, il y a une marche à l’entrée, parfois infranchissable. De plus, dans les brasseries parisiennes, les toilettes sont souvent au sous-sol. Pratique pour une personne qui n’a plus l’usage de ses jambes ! Là encore, la loi de 2007 impose à tous les établissements neufs l’accessibilité aux personnes à mobilité réduite. Mais personne ne la respecte.
À Paris, seuls douze restaurants ont reçu le label “Tourisme et handicaps"* que nous décernons. Ce sont les seuls qui ont fait un effort pour leur clientèle déficiente au plan visuel ou auditif ou à mobilité réduite. Pour aider les malvoyants, ces restaurants ont enregistré vocalement le menu du jour avec les prix correspondants. Cela ne demande pas un gros investissement. Et ça peut faciliter la vie d’une personne handicapée qui a aussi le désir d’aller déjeuner dehors.

"À Paris, seuls douze restaurants ont reçu le label “Tourisme et handicaps"* que nous décernons."

Au total, dans l’Hexagone, seulement 404 tables gourmandes ont reçu notre fameux label. C’est peu pour un pays comme le nôtre. La plupart du temps, quand vous dites au serveur que vous ne pouvez pas lire la liste des plats, il vous envoie balader en déclarant : “Je ne vais quand même pas vous déchiffrer toute la carte !"
Il faut toutefois souligner que certaines régions font de gros efforts. La Charente-Maritime en est un exemple. Les gens ont le souci de rendre accessibles leurs sites et leurs prestations : 24 restaurants, 17 hôtels, 34 offices de tourisme et 128 gîtes sont équipés pour recevoir les personnes handicapées ! Alors que Paris et la région Île-de-France, l’une des premières destinations touristiques au monde, ne possèdent que 154 sites et musées accessibles.
Autre anomalie dans la capitale : il est impossible pour une personne à mobilité réduite de boire son “p’tit noir" à 1,20 € au comptoir ! Elle est en effet obligée de prendre place à une table et son café lui sera donc facturé 2,40 €. Alors qu’un patron compréhensif pourrait lui faire payer sa boisson chaude au prix de celle prise au comptoir...
Pour les étrangers handicapés qui souhaitent visiter notre pays, ce n’est pas non plus facile. On comprend qu’ils préfèrent plutôt se rendre à Londres, à Barcelone ou encore à Rome où les structures sont mises en place pour un accueil adapté au handicap.
Heureusement, certaines initiatives françaises voient le jour depuis peu : ainsi une trentaine de plages de sable, situées entre Menton et Marseille ont reçu le précieux label. Les municipalités ont acheté, par exemple, des fauteuils roulants qui vont dans l’eau. Elles ont aussi mis en place un système de bracelets-montres destinés aux malvoyants : ils peuvent dorénavant aller se baigner tout seuls, étant avertis par le “bip" à leur poignet qu’ils ne doivent pas s’aventurer plus avant dans les vagues. »

Alicia Comet

www.tourisme-handicaps.org

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