Bibie : Sa carrière brisée par son compagnon !

France Dimanche
-BESTIMAGE

“Tout doucement”, le tube de l'année 1985, devait lui ouvrir les portes d'une carrière internationale, avant que sa vie ne devienne un enfer…

Béatrice Adjorkor Anyankor voit le jour le 9 janvier 1957 à Accra, au Ghana, et grandit au gré des affectations de son père diplomate en Allemagne, en Angleterre et au Liban. « Mes parents étaient très cultivés », confie-t-elle à nos confrères du Figaro. La musique est omniprésente dans sa famille, la « grande » bien sûr, Beethoven, Mozart, Schubert, le jazz, évidemment, John Coltrane, Louis Armstrong... et ses voix, Nina Simone, Ella Fitzgerald. À tout juste 14 ans, elle interprète un vieux standard de Nat King Cole lors d'un télé-crochet. Son timbre, puissant et chaud, lui ouvre immédiatement les portes du succès. Elle écume alors les plateaux de télévision africains.

En 1972, elle s'est fait un nom et une réputation. Cinq ans plus tard, elle s'installe à Lagos, capitale du Nigeria, où l'adoube l'immense Fela Kuti, musicien nigérian (qui fut aussi homme politique). Entretemps, Bibie a passé son bac, répondant ainsi à la volonté de ses parents. Mais ce qui l'intéresse, c'est la musique : « D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours voulu être chanteuse », confie-t-elle.

Dans un club d'Abidjan, en Côte d'Ivoire, elle fait la rencontre d'un certain Guy Gluck qui travaille pour Warner Music France. Elle hésite, dans un premier temps, à accepter les nombreuses invitations à un simple déjeuner que Guy lui adresse avec insistance... avant de tomber folle amoureuse de lui. En 1984, c'est ensemble qu'ils posent leurs valises à Paris.

Un soir, Guy lui présente un certain Jean-Pierre Dréau, compositeur des plus réputés qui a signé, entre autres, Le Coup de soleil de Richard Cocciante et l'album Bulles de Michel Polnareff. Dans ses tiroirs sommeille une chanson dont il ne sait que faire : Tout doucement (tout simplement). Deux prises à l'enregistrement suffisent pour transformer ce titre interprété par Bibie en un tube qui résonne toujours dans nos têtes. Guy et Jean-Pierre savent qu'ils tiennent là une pépite. Le triomphe est immédiat. Bibie se souvient : « Nous vendions vingt mille 45 tours par jour ! » pour un total dépassant le million de disques...

Même le grand Chris Blackwell, patron du label Island Records, l'homme sans qui la notoriété de Bob Marley n'aurait probablement jamais dépassé les faubourgs de Kingston (Jamaïque), veut prendre en main l'avenir artistique de la chanteuse. Pour Bibie, c'est la quasi garantie d'une carrière planétaire... C'est compter sans la présence de Guy Gluck, avec lequel elle s'est mariée : « Je suis devenue de plus en plus réservée, à mesure que Guy devenait dépressif. Il avait peur de me perdre et moi j'avais trop peur pour me confier à qui que ce soit, mais je subissais une vraie torture mentale. Finalement, j'ai décidé de le quitter en 1990. Il fallait que je me préserve et que je protège mon fils. Après cela, tout a dégénéré. »

“Je subissais une vraie torture mentale."

Et en effet, le sort s'acharne, le manoir qu'elle s'est offert dans l'Aisne, après le succès de Tout doucement, brûle à trois reprises. Malveillance ? On ne le saura jamais. Mais cet événement laisse Bibie littéralement sans voix : « À la suite de ce drame, j'ai été incapable de chanter pendant dix ans. »

“Guy était alcoolique", constatait, dévastée, la chanteuse.

Elle emprunte alors un autre chemin et décide de se consacrer aux autres, en donnant des cours de chant et de thérapie vocale. « Je me suis soignée en soignant les autres », affirme-t-elle avec cette dignité propre aux grandes dames. Depuis, elle n'a jamais cessé de chanter, y compris sur les tournées RFM Party 80 en compagnie de ses confrères et consœurs de l'époque.

Mais un ultime coup du destin annoncera sa mort en 2019 sur le plateau de Cyril Hanouna, Touche pas à mon poste. Pure fake news, bien sûr ! Bibie, 65 ans, chante toujours et encore. Une belle leçon de courage et de vie.

Églantine LEFEBVRE

En vidéo