Catherine Laborde : " C'est la maladie qui va l'emporter"

France Dimanche
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Jusqu'au bout, elle a voulu y croire, mais six ans après le diagnostic d'une pathologie cumulant les symptômes d'Alzheimer et Parkinson, l'ex-présentatrice météo Catherine Laborde sait que ses jours sont comptés…

« Je ressens un désespoir total, comme un enfant qui a perdu... » C'est par ces quelques mots, débités d'un ton hésitant, les yeux roulants dans le vide, que l'ex-présentatrice évoque son cauchemar sur le plateau deSept ˆ huit, sur TF1, le dimanche 4 octobre.

L'émotion est telle qu'Audrey Crespo-Mara, qui mène l'interview, en est elle aussi submergée. Habituée, désormais, à ne plus être maîtresse de son cerveau, de ses idées, de ses pensées, l'ex-miss Météo de TF1 reprend son souffle et ajoute, à son propos : « Je suis comme une personne qui n'a plus de lien avec l'extérieur... »

Touchante, tentant d'outrepasser sa vulnérabilité, celle qui a présenté la météo sur la première chaîne entre 1988 et 2017, a accepté de parler d'elle et de sa terrible maladie à cœur ouvert.

En effet, depuis qu'en 2014 Catherine Laborde et ses proches ont appris qu'elle était atteinte de démence à corps de Lewy, une pathologie cumulant les terrifiants symptômes de Parkinson et Alzheimer, son quotidien est devenu un enfer. Un enfer d'autant plus terrible que ce mal demeure incurable à l'heure actuelle. Il ne peut donc qu'empirer, jour après jour...

Lorsque Audrey Crespo-Mara lui demande comment elle va, on comprend tout de suite que la sincérité la plus absolue sera la troisième personne de cet échange. « Normalement, on dit : “Je vais bien, merci", parce que c'est automatique... Mais dans cette question, il n'y a pas d'automatisme, répond-elle avec un sourire voilé. Quand vous me demandez si je vais bien, je vous dirai que oui, quelquefois. Et quelquefois, ça ne va pas très bien »...

Et lorsque ça ne va pas, ce qui, hélas, arrive fréquemment, cela se manifeste de façons diverses, aiguës, et très handicapantes. Les mots d'abord, qui, soudain, la quittent. Surtout, explique-t-elle, « chaque fois que je veux dire quelque chose qui me tient à cœur »... Catherine ne trouve plus les mots. Pire : elle réalise avec effroi qu'elle est en train de perdre ce qui définit un être humain : sa mémoire ! « Là, je viens de vous parler et je ne me souviens plus ce que j'avais dit une demi-heure plus tôt, révèle-t-elle, le regard perdu. On ne sait plus où on est, qui on est. »

En plus de cette douloureuse situation, la maladie à corps de Lewy projette sa victime dans un monde sans repère, chaotique. Abandonnée à elle-même, elle ne sait plus à quoi se raccrocher. Aujourd'hui, Catherine a beaucoup de mal à se représenter dans l'espace. Surtout lorsqu'elle est privée de lumière : « Quand je suis dans le noir, je ne sais plus si je suis en haut, en bas, j'ai l'impression d'être dans une sorte de machine, secouée, et je ne sais plus où je suis ni qui je suis. »

Pas question, donc, de sortir seule dans les rues... D'autant qu'elle trébuche souvent. Mais le plus redoutable à vivre, peut-être, c'est la peur. « La peur qui paralyse, qui empêche. » Une terreur telle qu'elle a projeté Catherine « hors du monde des autres humains » !

Plus grave, encore : il semble évident que le combat contre son mal est vain : « C'est la maladie qui va l'emporter, je pense, à un moment ou à un autre », souffle-t-elle, triste. Mais au cœur de ce calvaire, Catherine n'est pourtant pas seule. Son mari, Thomas Stern, se tient à ses côtés, et la soutient de toutes ses forces. Son époux depuis 2013, après une longue relation quelque peu chaotique de vingt années, cet ex-publicitaire et prof de philo est devenu son pilier.

Ensemble, ils ont écrit un nouvel ouvrage, Amour malade. Quand aimer devient aider, (Plon) paru le 8 octobre. Comme pour son précédent livre, Trembler (Plon), sorti en 2018, c'est Thomas qui a écrit les parties dictées par sa femme, très conscient de la situation, comme il l'avait confié fin 2019 à 50 Minutes Inside : « Ce n'est pas une maladie dont on peut espérer qu'elle va aller vers une rémission. »

Dans ce livre, elle révèle aussi ses moments de découragement conjugaux dans toute leur crudité : « Je ne t'aime plus, tout est fermé, le dégoût a chassé la joie. » En réponse, son mari céderait parfois à la colère, exprimant envers sa femme des pulsions de meurtre. « Ça ne me choque pas. Je comprends ce désir de tuer, écrit-elle... De tuer celui qui apporte du mal. »

La tendresse, l'amour, prennent heureusement le dessus. Tout comme la fidélité de ses admirateurs, dont elle avait pensé qu'ils l'oublieraient, mais qui se manifestent toujours, et lui demandent de bien se soigner. Il y a aussi son neurologue, qui met tout en œuvre pour maintenir sa patiente « dans le monde des vivants ».

Mais, terriblement lucide, Catherine Laborde est consciente du chemin ardu que lui a fait prendre le destin : « Il y a un temps qui est terminé. Avant de vivre cette maladie, je ne le savais pas », dit-elle encore.

Mais malgré ce mal qui la ronge inexorablement, à 69 ans, elle ne peut s'empêcher d'exprimer ce qui est sa nature profonde : joyeuse, combative, drôle et légère, amoureuse de la vie, malgré tout. Cette formidable joie d'exister, elle nous la livre ainsi : « Il faut être vivant, être dans le mouvement de la vie... Ça ne se fait pas tout seul, mais... la vie continue. Toujours. »

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Laurence PARIS

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