Claude Brasseur : Il n’a jamais pardonné à sa mère !

France Dimanche
Claude Brasseur : Il n’a jamais pardonné à sa mère !

Dans un livre remarquablement sincère, l'acteur revient sur le manque d'amour de ses célèbres parents, Odette Joyeux et Pierre Brasseur. A 78 ans, il en souffre encore...

Nombreuses sont les personnalités qui s’essaient à l’art de l’autobiographie, avec plus ou moins de talent, parfois même alors que leur carrière balbutie. Claude Brasseur, pour sa part, n’avait jamais voulu remonter le fil du temps pour évoquer son parcours d’acteur, sa vie d’homme et de « fils de » issu d’une célèbre lignée de saltimbanques.

Pour la première fois, à 78 ans, le comédien ouvre son cœur et raconte ses souvenirs, dans Merci! coécrit avec Jeff Domenech, à paraître chez Flammarion le 10 septembre. Un livre dans lequel il clame tout son amour et son admiration pour ceux qui ont compté dans son existence, comme sa grand-mère maternelle et ses grands-parents paternels, ou encore Jean-Paul Belmondo, rencontré au Conservatoire d’art dramatique.

Mais l’interprète de Vidocq ne dit pas « Merci » à Pierre Brasseur (un descendant de la famille Brasseur, une dynastie de comédiens qui a commencé à faire parler d’elle sous la Monarchie de Juillet) et Odette Joyeux : « Je n’ai jamais connu l’amour de mes parents, regrette-t-il, que ce soit l’amour maternel ou l’amour paternel. Ils ne se sont jamais occupés de moi, ils avaient bien autre chose à faire. »

Pierre Brasseur

Odette Joyeux

Ces monstres sacrés, aussi accaparés l’un que l’autre par leur carrière, n’ont d’ailleurs pas longtemps vécu sous le même toit, et leur enfant unique a très tôt connu la garde alternée.

Une situation qui lui a valu une grosse surprise, lorsque, fait exceptionnel, son papa était venu le chercher lui-même chez sa maman pour l’emmener dîner avec Édith Piaf et Marcel Cerdan, son idole du moment. Une fois sur le palier, le petit, ébahi de voir ses parents parler ensemble, avait dit à son père : « Mais je ne savais pas que tu connaissais maman ! »

Si Claude Brasseur a noué des liens très forts avec son papa et semble encore aujourd’hui éprouver une grande admiration pour lui, la comédienne d’Entrée des artistes (1938), décédée en 2000 d’une attaque cérébrale, n’a pas su lui donner toute l’affection qu’un fils est en droit d’attendre d’une mère.

Une absence de tendresse que l’acteur ne lui a jamais pardonnée... Pour preuve, sa réponse à son interviewer qui lui glisse : « Freud a dit : “On devient adulte quand on a pardonné à nos parents le mal qu’ils nous ont fait." Tu en penses quoi ? » Après un long silence, Claude Brasseur affirme que, dans ce cas, il doit être resté enfant !

Plaie ouverte

Il faut dire que ce qu’il raconte sur l’auteur de Côté jardin, mémoires d’un rat, devenu un célèbre feuilleton télévisé sous le titre L’âge heureux, en dit long sur cette mère malgré elle... « Elle a toujours considéré que j’avais été un énorme handicap pour sa carrière. Mais je n’allais tout de même pas m’excuser d’être né, et je n’allais pas non plus me retirer de sa vie. C’est plutôt mon père qui aurait dû se retirer : comme ça, au moins, je ne serais pas là ! »

En lisant ces mots durs, on se dit que celui qui a eu Ernest Hemingway pour parrain doit sûrement exagérer ! Difficile de croire qu’une maman digne de ce nom ne ressente pas une once d’affection pour son enfant ! Hélas, sa douleur n’est pas feinte, et Odette Joyeux elle-même ne s’en était pas cachée...

« Elle a écrit dans son livre [Entrée d’une artiste, publié chez Payot en 1994, ndlr] qu’elle n’avait pas été amoureuse de mon père, et que le pire jour de sa vie était celui où elle a appris qu’elle était enceinte – la contraception n’existait pas à ce moment-là, explique encore le comédien. Je ne trahis pas sa mémoire en racontant ça, puisqu’elle a eu le mauvais goût de l’écrire dans son autobiographie. »

Ce recueil de souvenirs, paru alors qu’il était déjà une star du cinéma français, a sans doute rendu encore plus douloureux le sentiment d’avoir été mal aimé, rejeté par celle qui, pourtant, aurait pu au moins partager avec son fils sa passion pour la comédie. Pourtant, l’acteur se souvient qu’ils parlaient très peu du métier qu’ils avaient en commun, comme si un malaise planait...

Alexandre Brasseur

Cette plaie ouverte, qui, sans doute, ne se refermera jamais, n’a pas empêché ce Brasseur de père en fils de réussir son existence. Il a rencontré l’amour avec Mimi, qui partage sa vie depuis 1970 et lui a donné un fils, Alexandre, qu’il aime de tout son cœur et qui suit le même chemin que lui... Une manie dans la famille !

Claude Brasseur sera bientôt sur les planches pour interpréter Georges Clemenceau, dans La colère du Tigre, une pièce de Philippe Madral, au théâtre Montparnasse, à Paris. Il interprètera Georges Clemenceau aux côtés de Michel Aumont dans le rôle de Claude Monet.

Nul doute que, une fois le rideau fermé, son public, chaque soir plus nombreux, lui dira un grand... merci !

Clara Margaux

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