Danielle Darrieux : Le talent éternel

France Dimanche
Danielle Darrieux : Le talent éternel

76 ans de carrière pour Danielle Darrieux et toujours aussi fraîche, fringante, animée par la même fureur de vivre

Etonnante , merveilleuse, Danielle Darrieux ! N'est-elle pas époustouflante de jeunesse et de joie de vivre, elle qui, à 90 ans, vient encore de tenir un rôle très remarqué au cinéma, au côté de Laura Smet, dans L'Heure zéro, un polar de Pascal Thomas, d'après Agatha Christie.

Oui, à n'en pas douter, la plus célèbre de nos comédiennes fait partie de ces êtres bénis des dieux sur lesquels le temps semble n'avoir aucune prise. À l'âge où la plupart de ses contemporains savourent, depuis longtemps, les délices de la retraite, la sublime Danielle ne veut pas dételer.

Pas question pour Mademoiselle Darrieux de mettre un terme à une carrière exemplaire commencée il y a... soixante-seize ans. « C'était en 1931, j'avais à peine 14 ans lors de mon premier film », a-t-elle souvent rappelé. Quatre ans plus tard, son charme irrésistible et son talent révélés sur tous les écrans de France faisaient de la juvénile Danielle une star à part entière.

Mythique

Un statut envié qu'elle pourrait encore revendiquer aujourd'hui, après 150 films avec des partenaires aussi mythiques que Jean Gabin, Charles Boyer ou Gérard Philipe. Sans compter le théâtre, son autre grande passion. Un art dans lequel elle a toujours excellé et qui lui a valu, en 2003, le Molière de la meilleure comédienne pour son double rôle dans Oscar et la dame Rose, la pièce d'Éric-Emmanuel Schmitt dans laquelle elle incarnait... un petit garçon, avec un naturel désarmant.

Un succès qui devait la combler sur le plan professionnel mais en lui laissant une telle sensation de fatigue qu'elle quitte définitivement les planches après le dernier baisser de rideau de la Dame Rose. « J'adore le théâtre, expliquait encore la grande comédienne, il y a un an, au Figaro, mais, même plus jeune, je trouvais ça lassant d'être sur scène tous les soirs. »

Alors, finies, terminées à jamais, les apparitions toujours très attendues de Danielle Darrieux sur nos plus grandes scènes nationales ? Pas du tout ! L'actrice vient en effet de changer d'avis. Elle a décidé de renouer avec la grande passion de sa vie. En avril prochain, quelques jours avant de souffler ses 91 bougies, elle fera à nouveau le bonheur de tous ses fans en remontant sur les planches.

Six ans après son triomphe dans la Dame Rose, la dame blonde au charme éternel donnera la réplique à Jean Piat dans La Maison du lac, au Théâtre de Paris. Un record de longévité professionnelle pour celle qui n'en est toujours pas revenue d'avoir connu le XXIe siècle !

« Je repense à ce jour très précis où j'avais 18 ans, a-t-elle confié au magazine Les Inrockuptibles. Je me regardais dans une glace. C'était au milieu des années 30. Je pensais à l'an 2000 et je me disais que je serais morte depuis longtemps. Cela me paraissait impossible de m'imaginer vivante à 83 ans. Maintenant, il faut que je me dise non seulement que c'est arrivé, mais que depuis, sept ans ont encore passé !»

Pétillante

Des années jalonnées de succès et de grands bonheurs professionnels tels que 8 femmes, le film de François Ozon où Danielle jouait une mamie avare et alcoolique, ou encore Nouvelle chance, en 2006. Sans oublier, cela va de soi, cette dernière performance dans L'Heure zéro : tenir le rôle d'une grand-mère (encore), mais cette fois, clouée dans un fauteuil roulant, dans le cadre somptueux d'une immense villa de Dinard. Un rôle de composition, bien sûr.

Car dans la vraie vie, heureusement, la pétillante nonagénaire se montre toujours d'une vitalité et d'une santé resplendissantes. Une évidence absolue pour Pascal Thomas, le réalisateur du film. Mais aux yeux de la production et des assureurs, cela n'a pas été aussi simple. Il s'en est même fallu de peu que le projet capote au dernier moment.

« La compagnie ne voulait pas assurer Danielle sous prétexte qu'un tel tournage serait dangereux pour une personne de son âge, raconte le metteur en scène. Mais heureusement, durant les neuf semaines prévues, elle n'a pas eu le moindre rhume. À son âge, elle est comme un oiseau, une merveille. Danielle Darrieux est un monument historique, un trésor national. »

Un véritable joyau dont on n'a peut-être pas encore découvert toutes les facettes.

Jean Le Breton

En vidéo