Diane Dufresne : À 70 ans, elle revient plus affranchie que jamais

France Dimanche
Diane Dufresne : À 70 ans, elle revient plus affranchie que jamais

Lundi 29  septembre, l’extravagante Québécoise fêtait avec un jour d’avance ses 70 ans au théâtre du Châtelet. Retour sur le parcours flamboyant d’une artiste qui ne fait rien comme tout le monde...

«Je n’ai plus l’âge de mon image», chantait Diane Dufresne en 1979, dans Les adieux d’un sex-symbol, l’un des titres du célèbre opéra rockStarmania... C’était il y a trente-cinq ans, mais le temps semble n’avoir aucune prise sur ce beau visage lisse, ces yeux d’un bleu presque transparent et cette bouche qui ne sourit jamais sur commande.

Certes, à l’aube de son 70e anniversaire, qu’elle a fêté avec un jour d’avance le lundi 29 septembre au théâtre du Châtelet à Paris, la Québécoise s’est, en apparence, assagie. C’est en effet une très belle femme, à l’élégance discrète, que vous avez pu voir dans l’émission de Laurent Ruquier, le 27 septembre.

Mais, deux jours plus tard, sur la scène du célèbre théâtre parisien, avec son show Partager les anges, le « volcan », comme on la surnomme, se montrait à la hauteur de sa réputation ! Artiste rebelle, aux tenues extravagantes, Diane Dufresne l’inclassable a envoûté le public !

Il faut dire que, pour ce qui est du non-conformisme, la chanteuse a de qui tenir ! Sa mère, qu’elle a hélas perdu très jeune, à 12 ans, était un modèle du genre, comme elle l’a confié au Parisien : «Elle s’achetait des robes avec de la fourrure, elle avait les cheveux platine. Elle était tellement sexy que, quand elle tondait son gazon, la police venait l’arrêter parce qu’elle était trop provocante. »

C’est aussi sa mère qui lui a transmis l’amour de la musique : « Nous chantions toutes les deux. Elle écoutait tout le temps la radio. J’étais très proche d’elle », raconte-t-elle dans Télérama. Empruntant les tenues maternelles, la fillette se met en scène, inventant des shows délirants pour la plus grande joie de maman...

À la mort de cette dernière, une chape de plomb s’abat sur la maison familiale. Mais si Diane abandonne l’école, elle ne renonce pas à son rêve de chanter et, à 18 ans, s’envole pour Paris, la ville de ses idoles : Brel, Greco, Barbara...

Malgré une timidité si maladive (si, si !) que la jeune femme se couvre parfois d’eczéma, elle trouve néanmoins le courage de toquer à la porte de Charles Aznavour qui lui conseille de prendre des cours de chant. Elle se produit dans des cabarets, décroche quelques critiques élogieuses et revient au pays, où elle est engagée dans des clubs sans parvenir à percer.

C’est en 1968 qu’elle fait la rencontre qui bouleverse sa vie : celle de Janis Joplin, lors d’un concert à Montréal. Ce sera une révélation, comme elle l’explique encore dans Télérama : «J’avais trouvé mon chemin. Moi aussi, je me suis mise à crier. Cela me libérait. À la maison, quand je répétais, mon chien hurlait en même temps que moi ! »

Libérée

Libérée, un mot qui ne cessera de la définir. Car Dieu sait qu’il fallait se sentir libre en 1973 pour apparaître à l’Olympia, en première partie de Julien Clerc... en string ! « On aurait dit un fil dentaire passé entre les fesses », s’amuse-t-elle, toujours dans Télérama. Le public est choqué. S’il aime le tube J’ai rencontré l’homme de ma vie, que Luc Plamondon a écrit pour Diane l’année précédente, il ne s’attend pas à voir débouler sur scène une Canadienne si affranchie.

Seul Bruno Coquatrix, au flair légendaire, la rassure : « Un jour, tu seras aimée pour les mêmes raisons qui font qu’aujourd’hui on te rejette. » Il ne se trompait pas... Il y a toutefois un autre homme qui, à l’époque, aime cette avant-gardiste pour ce qu’elle est : Maxime Le Forestier, dont elle a partagé la vie durant quelques années. Comme elle le confie : « Il m’a appris qu’un homme pouvait respecter une femme. »

Au fil du temps, Diane s’impose par sa voix, son style, savoureux mélange de variété, rock et même punk, et ses tenues vestimentaires plus hallucinantes les unes que les autres. Tantôt vêtue d’une robe de plusieurs mètres de long, un violon en équilibre sur un improbable chignon, tantôt en mode minimaliste, les seins à l’air, elle étonne, détone, provoque... et séduit un public de plus en plus nombreux.

C’est d’ailleurs après l’avoir vue dans un de ses shows extravagants, l’Opéra-cirque, que Michel Berger a l’idée de créer Starmania, pour lequel il fera d’ailleurs appel au parolier de Diane, Luc Plamondon. Un succès qui n’allait cependant pas laisser que de bons souvenirs à l’interprète de Stella ! « L’ambiance était lourde. Les ­costumes étaient affreux. Et puis c’était un peu la bataille des ego », avoue-t-elle.

Elle s’y est d’ailleurs fait, bien malgré elle, un ennemi en la personne de Daniel Balavoine, comme elle l’a évoqué dans On n’est pas couché : « Il n’a pas été très sympathique avec moi. En fait, il me détestait. »

Vertige

Aussi, après trois semaines cauchemardesques, d’avril à mai 1979, sur la scène du Palais des Congrès à Paris, la Québécoise rend son tablier et reprend sa route. Elle entraîne dans son sillage, des fans, de plus en plus conquis par cette femme hors norme, qui leur demande de venir à ses concerts vêtus comme des personnages de Fellini, ou bien, comme dans son spectacle Magie rose, en 1984, à Montréal, habillés de rose !

En a-t-elle alors trop fait ? Toujours est-il qu’après ce show, la critique se déchaîne, l’accusant notamment de mégalomanie. Meurtrie, Diane Dufresne quitte le Québec pour la France, où elle s’installe durant dix ans, se consacrant à l’étude de la kabbale et à la peinture, sa deuxième passion.

C’est à cette époque qu’elle rencontre l’homme de sa vie, Richard Langevin, un sculpteur québécois, qui devient son agent et qu’elle épouse en 1995. Il la pousse à reprendre sa carrière de chanteuse, dans des salles plus intimistes, où elle peut librement exprimer son talent, même si elle confesse avoir désormais le trac.

L’idée de souffler ses 70  bougies au Châtelet lui donnait le « vertige », avouait-elle, il y a quelques jours. Une fois de plus, c’est elle qui nous a fait tourner la tête, avec ce show empreint d’une fantaisie débridée et d’émotion pure.

Merci, chère Diane Dufresne, et encore très bon anniversaire !

Lili Chablis

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