Ingrid Chauvin : Elle n’a pu empêcher son père de boire !

France Dimanche
Ingrid Chauvin : Elle n’a pu empêcher son père de boire !

Dans un livre, l’actrice confie sa peine après la perte de sa fille à 5 mois, le 25 mars 20 14. Mais Ingrid Chauvin y raconte aussi son enfance modeste, et sa � déchirure � face à un père alcoolique…

Lorsque le drame vous frappe en plein cœur, lorsque la douleur et le chagrin sont devenus insupportables, certains d’entre nous plongent sans espoir de retour dans un abîme de détresse et de désolation. D’autres préfèrent se noyer dans le travail, prêts à tout pour ne pas ressasser leur peine ou s’apitoyer sur leur sort. Ce choix, celui de se tourner frénétiquement vers la vie, est celui qu’a fait Ingrid Chauvin après la disparition tragique, le 25 mars 2014, il y a tout juste un an, de sa petite Jade, à peine âgée de 5 mois, des suites d’une malformation cardiaque.

Face à cette tragédie que toutes les mères du monde redoutent d’avoir à affronter, la courageuse actrice s’est battue pour ne pas sombrer, en faisant son métier : après le tournage de Rumeurs, d’Étienne Dhaene, diffusé sur France 3 le 9 décembre 2014, l’héroïne de Dolmen a joué sous la direction de son mari, Thierry Peythieu, dans Meurtres au mont Ventoux, qui sera prochainement diffusé, et renoue avec la scène dans Hibernatus, aux côtés de Jean-Luc Reichmann et d’Anouchka Delon, au théâtre de la Michodière jusqu’au 29 mars.

Angoisse

Mais, consciente peut-être qu’incarner des personnages était une façon de fuir sa propre vie, cette maman dévastée a décidé de coucher ses souvenirs sur du papier, pour, sans mauvais jeu de mot, tourner la page. Dans À cœur ouvert, édité chez Plon, la belle Ingrid Chauvin s’est livrée comme jamais, mais avec une grande dignité, sur le drame qu’elle a vécu l’an dernier, qui reste la pire épreuve de sa vie, tout en évoquant d’autres blessures intimes...

Elle raconte entre autres son enfance modeste, dans l’ombre guère rassurante d’un père dont la fragilité a fini par l’emporter dans la tombe, en 2003.

Ingrid n’est encore qu’une toute petite fille quand ses parents, qui se déchirent déjà depuis longtemps, se séparent. Une rupture que son papa ne supporte pas du tout, au point que celui qu’elle considère alors comme un véritable héros se sert d’elle comme d’une arme contre sa maman : « Désespéré, il menaçait de me kidnapper et de se suicider en voiture avec moi. C’était très angoissant pour la petite fille que j’étais », écrit-elle.

Pourtant, bien qu’elle soit très malheureuse de voir ces deux êtres qu’elle aime passionnément partir chacun de leur côté, la fillette de 9 ans soutient sa mère. Ingrid Chauvin a beau être une enfant, elle est consciente que la situation n’a que trop duré pour cette femme qui a encore de belles années devant elle. Après le divorce, Ingrid devra attendre trois longues années avant de revoir son père, qui est désormais remarié avec Christine, une femme adorable, qui semble l’avoir apaisé.

Mais cet homme blessé est poursuivi par des démons bien décidés à ne pas le lâcher. Car sa jeunesse a été entachée par un secret de famille lourd à porter et qui ne lui a été révélé qu’à son adolescence : il n’est pas l’enfant de l’homme qui l’a élevé et reconnu, car sa mère était déjà enceinte avant de se marier avec lui. Pire encore, il n’était pas désiré. Et, lorsqu’à 16 ans il a appris la vérité, son univers a basculé : « Je pense que c’est à partir de ce moment-là qu’il s’est inventé des vies et que s’est développée une mythomanie pathologique », explique Ingrid Chauvin dans son livre.

Cette fêlure, il la soignera à sa façon : « Personne n’a jamais pu abolir la profonde angoisse qui le jetait dans l’alcool, déplore sa fille. Il buvait. Beaucoup [...] Souvent, lorsque je revenais de l’école, il me donnait quelques pièces pour aller lui acheter des bouteilles de vin. »

Malgré tout l’amour qu’elle éprouve pour cet homme dont elle affirme qu’il était « infiniment généreux, mais extrêmement perturbé aussi, sensible, tendre », Ingrid Chauvin sera la spectatrice impuissante de ses excès : « Ses paroles étaient parfois dures à encaisser, ses menaces de suicide surtout me terrifiaient, écrit-elle. Il n’oubliait jamais de préciser qu’il mettrait fin à ses jours avec une photo de moi posée sur son ventre. »

Violence

On imagine aisément le chaos moral dans lequel la jeune fille était plongée face à ce désastre de père... Pourtant, malgré les signes évidents du mal qui le rongeait, malgré les crises et les mots malheureux, malgré la violence verbale insoutenable, la comédienne avoue n’avoir pas souhaité voir qu’il buvait plus que de raison.

« Je ne voulais pas accepter l’idée qu’il était alcoolique, explique-t-elle. Je ne voulais pas savoir. Il aimait boire, un point c’est tout. Je ne l’ai vraiment compris que lorsque, à la fin de sa vie, il a été rattrapé par sa cirrhose. »

En 2003, à l’âge de 56 ans, le papa ­d’Ingrid s’éteint. Lui qui avait si souvent menacé de se suicider, a finalement laissé l’alcool, ce fléau, faire, doucement mais sûrement, le sale boulot à sa place. « Moi je sais qu’il est mort aussi de cette douleur d’enfance qui le rongeait et qu’il n’avait pas pu calmer », conclut l’actrice.

Ingrid Chauvin a pris le temps, juste avant l’incinération de son père, de lui dire tout son amour et de déposer une photo d’elle sur sa dépouille...

Clara Margaux

En vidéo