Jacqueline Caurat : "Mes petits-enfants sont mon rayon de soleil"

France Dimanche
Jacqueline Caurat : "Mes petits-enfants sont mon rayon de soleil"

Même si n'aime pas le télé d'aujourd'hui, la première speakerine garde les yeux bien ouverts sur le monde et défend toujours sa passion : la philatélie.

Elle est la mémoire vivante de la télévision Française... Evoquer le nom de Jacqueline Caurat, c'est se souvenir avec émotion des premières speakerines et des émissions de philatélie que des millions de fidèles ne manquaient pour rien au monde. L'oeil toujours aussi pétillant et vif, cette grande dame de la télévision a bien voulu nous recevoir, chez elle, dans son appartement situé à deux pas de la Maison de la Radio pour une interview exclusive. Le petit écran, son amour pour les timbres, son mari trop tôt disparu, et l'amour qu'elle porte à ses petits-enfants, Jacqueline nous en a parlé sans retenue...

France Dimanche (F.D.) : Vous avez été l'une des premières speakerines, avec Catherine Langeais et Jacqueline Joubert, au début des années 1950. Quels souvenirs en avez-vous gardé ?

Jacqueline Caurat (J.C.) : C'était en 1953 ! Nous étions un peu en famille puisque chaque soir nous nous invitions chez les téléspectateurs... Je recevais également beaucoup de courrier, et même des questions du style : « Madame Caurat, vous portiez hier soir un ravissant corsage. Où puis-je m'en procurer un identique au vôtre ? » Bien évidemment, je répondais à chaque lettre !

F.D. : Pouvait-on parler de magie de la télé à cette époque ?

J.C. : Oh oui ! C'était nouveau, il n'y avait qu'une seule chaîne et l'on travaillait avec les moyens du bord. Pour ma part, j'animais aussi de nombreuses émissions scolaires en partenariat avec l'Education Nationale, ainsi que des émissions religieuses. Et puis, il y avait bien sûr, ma passion pour les timbres et les émissions qui leur étaient consacrés.

F.D. : Vous parlez de Télé-Philatélie et de Philatélie-Club ?

J.C. : Oui. De 1961 à 1983, ces programmes ont captivé des millions de gens. Ils étaient co-produits par mon mari, Jacques Mancier. Nous avons reçu des collectionneurs célèbres, comme Rainier III de Monaco, des dessinateurs et graveurs de timbres, comme Jean Cocteau qui esquissa sa nouvelle Marianne sur un miroir à l'aide de mon rouge à lèvres... L'émission a changé de titre, en 1974, avec le passage à la couleur et le démantèlement de l'ORTF.

F.D. : Pouvez-vous nous expliquer d'où vient cet amour pour les timbres ?

J.C. : Le timbre c'est tout à la fois : l'évasion, la communication, l'ouverture et la rencontre avec les érudits. Mon regret, c'est qu'il n'y ait plus d'émission sur la philatélie à la télévision aujourd'hui. Il serait bon d'y intéresser les jeunes, tant en France que dans le monde entier. Pour l'anecdote, il est important pour moi de savoir que le premier timbre émis date de 1840 et que la première enveloppe remonte à 1820.

F.D. : C'est pour votre intérêt de philatéliste que vous êtes, depuis hier, Porte de Champerret à Paris, pour cet extraordinaire salon* ?

J.C. : Vingt-cinq pays y sont représentés, et les visiteurs peuvent voir en boucle sur un grand écran l'émission Philatélie-Club.

F.D. : Vous avez évoqué Jacques Mancier, votre mari disparu il y a quelques années. Vous aviez en commun, entre autres, cet amour pour les timbres...

J.C. : Oui. Jacques et moi produisions ces émissions. Mais, au départ, Jacques était comédien. Ce qui avait le don, à l'époque, de provoquer chez moi, des réticences...

F.D. : Pour quelle raison ?

J.C. : En toute franchise, je ne voulais pas épouser un comédien ! Peut-être parce que je ne les trouvais pas sérieux et quelque peu superficiels. Mais l'amour a été le plus fort et nous nous sommes aimés pendant 50 ans. Cinquante années de bonheur, de complicité et de passions communes. La télé bien sûr, mais aussi les timbres, la production, et notre intérêt pour le spectacle ! Ah, Jacques ! Quand je pense à certains de ses films, Les Aventures d'Arsène Lupin, en 1956, L'Increvable, en 1958, ou Les Chevaliers du Ciel, à la télévision, en 1967... Nous étions heureux tous les deux, jusqu'à cette maudite date du 30 avril 2001, où son coeur s'est définitivement arrêté.

F.D. : La notion de famille est très importante pour vous. Vous êtes très fière de vos petits enfants...

J.C. : Ils sont mon rayon de soleil... Je suis très heureuse de mon Adrien, 16 ans, qui se destine à une carrière d'ingénieur dans l'aviation. Quant à Julia, 20 ans, elle veut, dès l'obtention de sa licence, faire carrière dans le tourisme et l'hôtellerie. Nous sommes très proches...

F.D. : Entre vos petits-enfants, la philatélie et votre amour pour les animaux, prenez-vous le temps de regarder la télévision ? Et quelles sont vos émissions préférées ?

J.C. : Très franchement, je ne la regarde pas beaucoup. C'est devenu une course au profit et à l'audimat, et bien souvent l'animateur se prend pour quelqu'un de supérieur. Et puis, force est de constater que dans la plupart des films diffusés, tout y est vulgaire et grossier. Je sais, l'époque a changé, les mentalités aussi, mais, par moments, trop c'est trop. En revanche, je ne manque sous aucun prétexte l'émission de Frédéric Taddeï sur France 3 et la plupart des documentaires diffusés sur France 5. Evidemment, comme j'aime être tenue au courant de ce qui se passe dans le monde, je regarde le journal de 20 h, aussi bien celui de TF1 que celui de France 2.

F.D. : Sortez vous au théâtre ou dans d'autres lieux culturels ?

J.C. : Quelques fois, oui. J'y prends beaucoup de plaisir. Ainsi, moi qui voue une admiration sans faille à Robert Hossein, je ne manquerai pas son dernier spectacle "Marie", au Palais des Congrès. Cet homme, que j'ai connu à ses débuts, est un véritable visionnaire et un créatif exceptionnel.

F.D. : Pour conclure Jacqueline, quel serait votre plus grand souhait dans l'immédiat?

J.C. : N'oubliez pas les timbres! Je profite de l'occasion qui m'est donnée par France Dimanche pour lancer ce cri : parlez des timbres ! Dans mon appartement, j'ai une pièce où tout leur est consacré : des photos, des albums, des catalogues. Dans ma bibliothèque, les timbres sont légion. Alors laissez-moi croire, que dans un avenir proche, il y aura une émission consacrée à la  philatélie et ce sur n'importe quelle chaîne. Les gens, qu'ils soient jeunes ou non, en sont privés. Je suis prête, comme par le passé, à m'y investir au maximum, avec toute mon énergie.

Propos recueillis par Bernard Moncel.

* Le 65e salon philatélique d'automne a lieu du 3 au 6 novembre 2011 à Paris Expo, Espace Champerret, Hall A. De 10 h à 18 h. Entrée gratuite.

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