Monty : “J’ai fait pleurer Michel Drucker !”

France Dimanche
Monty : “J’ai fait pleurer Michel Drucker !”

En 1976, Monty magnifiait l’épopée du club de football 
de Saint-Étienne avec son tube “Allez les Verts !” Quarante et un ans plus tard, le voici de  retour  avec un double album et une biographie.

À 74 ans, l’actualité de Monty est florissante. Outre le double album qui réunit une cinquantaine de ses chansons (en exclusivité chez Marianne Mélodie), Jacques Bulostin (son vrai nom) sort un livre, préfacé par Michel Drucker, et retraçant toute sa vie.

Son enfance, ses débuts dans le métier aux côtés d’une certaine Dalida, les autres rencontres qui ont marqué sa carrière d’auteur, compositeur, interprète, ou encore de producteur, sans oublier, bien sûr, la chanson mythique Allez les Verts ! qui l’aura hissé au panthéon du football.

France Dimanche (F.D.) : Comment est née l’idée de vous raconter dans un livre ?

Monty (M.) : Ça faisait longtemps qu’il ne s’était pas passé grand-chose pour moi. Je trouvais donc que c’était le moment ou jamais de raconter mon histoire. Je commence en effet à avoir un âge légitime pour le faire. Et quand je vois toutes les bêtises qui peuvent sortir au sujet de certains de mes copains célèbres récemment disparus, je préfère le réaliser moi-même de mon vivant. J’ai écrit ce livre avec mon ami Michel Bourdais [rédacteur, photographe et conseiller artistique, ndlr] qui m’a accompagné tout au long de ma carrière, de 1963 à aujourd’hui, et qui me connaît par cœur. Peut-être même mieux que moi ! Ça nous a pris dix ans pour mettre tous mes souvenirs noir sur blanc. Moi qui ai l’habitude d’écrire des chansons en quelques heures, parfois quelques minutes, ça me change.

F.D. : Quels rapports entretenez-vous avec Michel Drucker, qui a préfacé votre livre ?

M. : Michel Drucker a suivi l’épopée des Verts en tant que commentateur pendant que moi j’étais dans les tribunes à chanter Allez les Verts ! C’est donc resté pour lui aussi une belle époque. Le maire de Saint-Étienne, Gaël Perdriau, nous a d’ailleurs remis à tous les deux en même temps la médaille de la ville. C’était très émouvant. Comme Michel l’écrit dans cette préface, je l’ai récemment fait pleurer à cause de ma chanson qui le replonge dans le passé. C’est un homme que je respecte depuis toujours et qui me le rend bien.

F.D. : Quels souvenirs gardez-vous de vos débuts sur scène ?

M. : Je me souviens très bien de ma toute première télévision, le mercredi 11 décembre 1963, à 20 h 30, dans l’émission Âge tendre et tête de bois. Lorsqu’Albert Raisner m’a annoncé, je n’en menais pas large. Mais ce n’était rien comparé à la première fois, peu de temps après, où je devais me produire devant un public. C’était un soir au théâtre de la Porte Saint-Martin, en première partie de Dalida. Quelques minutes avant de monter sur scène, le trac m’a poussé à fuir dans la rue pour rentrer chez moi. Si Dalida, qui deviendra ma marraine de cœur, ne m’avait pas couru après pour me ramener à la raison, peut-être n’aurais-je pas fait carrière dans la chanson. Je lui dois énormément. Son amoureux de l’époque, le patron d’Europe 1, Lucien Morisse, m’avait demandé de la « surveiller » durant une tournée parce qu’elle venait de faire une tentative de suicide. J’étais à la fois très honoré et angoissé d’une telle responsabilité. Quoi qu’il en soit, ça noue forcément des liens. Je lui ai écrit une trentaine de chansons. Elle en a gardé deux, j’étais ravi ! Je la considérais vraiment comme une grande sœur. J’ai aussi eu la chance par la suite de devenir ami avec Claude François, Eddy Mitchell, Stone et Charden, Frank Alamo, et tant d’autres !

F.D. : Pensiez-vous faire de la chanson votre métier ?

M. : Absolument pas ! J’ai d’abord voulu vivre de ma passion pour le football. Mais après m’être cassé les deux chevilles, j’ai dû renoncer à mon rêve d’enfant. Moi qui ai toujours baigné dans la musique grâce à mon père, je me suis finalement retrouvé à écrire des chansons pour les autres [Monty a écrit notamment pour Charden, France Gall, Sheila, Dalida, Jeane Manson, Sylvie Vartan, Eddy Mitchell... ndlr]. Et c’est ensuite par le plus grand des hasards que je me suis retrouvé un jour avec un micro devant la bouche. En fait, je suis un footballeur qui a mal tourné [rires]. Et pour l’anecdote, j’ai encore des plaques en métal dans les chevilles qui sonnent dès que je passe le contrôle à l’aéroport ! Mais sans ces plaques, je ne pourrais plus marcher...

Monty reçoit un disque d'or pour "Allez les Verts !" en décembre 1976

F.D. : Il paraît que vous avez mis à peine dix minutes pour écrire votre chanson Allez les Verts !

M. : C’est vrai. Ça faisait quatre ans que j’étais un grand supporter de l’équipe de Saint-Étienne, et on n’arrêtait pas de me dire : « Mais pourquoi tu n’écris pas une chanson pour le club ? » J’avais beau essayer, ça ne venait pas. Puis un jour, alors que j’étais coincé dans les embouteillages sur les Champs-Élysées, je m’énervais contre les autres automobilistes en criant : « Allez ! Allez ! » J’ai soudain eu un flash et voilà comment est né ce tube qui est devenu l’hymne des Verts, et qui est encore diffusé à tous les matchs au stade Geoffroy-Guichard ! Ce qui est amusant aujourd’hui, c’est que bien des gens pensent que je suis stéphanois, alors que je suis né et vis toujours à Paris... Saint-Étienne reste toutefois ma ville de cœur, et je continue d’y aller très souvent. J’y rencontre à chaque occasion des gens qui ont été marqués par ma chanson. La dernière fois, une dame m’a dit, en pleurs, que son mari, qui venait de décéder, avait souhaité que l’on passe Allez les Verts ! à son enterrement. C’est dingue ! Ça me donne l’impression d’avoir au moins servi à quelque chose.

F.D. : D’autres souvenirs récents ?

M. : Il y a trois ans, j’ai eu la chance de participer à la tournée Âge tendre et têtes de bois, alors que ça faisait trente ans que j’avais mis ma carrière de chanteur entre parenthèses, suite au décès de mon père. Faire 52 Zénith devant 10.000 personnes deux fois par jour, ça m’a fait bizarre. Je me souviens d’ailleurs que je partageais la loge avec mon copain Herbert Léonard. J’ai appris bien plus tard qu’il détestait le vert alors que je ne m’habille que de cette couleur. Comme Michou avec le bleu ! Sur scène, j’enfile invariablement le fameux maillot de Saint-Étienne. Et en ville, je porte toujours un blouson en cuir, une montre, des lunettes vertes. Mais Herbert a eu l’élégance de ne pas me le dire... Cette couleur m’a souvent porté chance. Mais pas toujours. Je me souviens d’une tournée que je devais faire avec Mireille Mathieu. Elle a refusé que je l’accompagne parce qu’elle estimait que le vert portait malheur dans le métier. Elle a donc finalement choisi Michel Delpech à ma place...

F.D. : Avez-vous de nouveaux projets ?

M. : J’en ai plein. Le jour où je n’en aurai plus, je serai mort ! J’aimerais bien sortir un deuxième livre, parce que j’ai encore tellement de choses à raconter sur ma carrière... Il se pourrait aussi que je reparte bientôt en tournée. En attendant, je vais essayer de profiter un maximum de ma famille. Avec mes huit enfants et mes quatorze petits-enfants répartis un peu partout dans le monde, je vous garantis que les fêtes de fin d’année sont animées à la maison !

Pour chaque livre vendu, 1 euro est versé à l’association ASSE Cœur vert, présidée par Dominique Rocheteau, qui, entre autres buts, encourage la solidarité face à la maladie et au handicap.

Philippe Callewaert

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