Si Lucienne Delyle, Georges Brassens, ou encore Gilbert Bécaud l'ont précédée dans l'antre du music-hall en se pro-duisant dès sa réouverture, la Môme y était littéralement chez elle. Ses récitals ont par deux fois sauvé le théâtre de la catastrophe ! « C'est grâce à elle si, en 1956, deux ans à peine après son ouverture, l'Olympia n'a pas fermé ses portes », écrit Doudou Morizot. Même sauvetage en 1960 lorsqu'elle accepte de chanter trois semaines à guichets fermés... sans réclamer l'intégralité de son cachet ! La chanteuse, superstitieuse, avait un rituel avant chaque tour de chant : elle se baissait pour embrasser un endroit précis de la scène que les machinistes appelaient « le carré Piaf ».
« Sylvie n'avait aucun don artistique, gauche, arythmique, une voix de fausset, presque insignifi ante, mais adorable et délicieuse, elle était la dernière de la classe. Elle allait devenir l'une des premières », écrit Doudou. Ambitieuse, la blonde aurait vite senti que l'idole des jeunes serait un tremplin : « Je ne dis pas que Sylvie n'a pas aimé Johnny, loin s'en faut. Elle ne touchait plus terre à l'idée de se retrouver dans les bras d'une telle vedette. [...] Mais dans cette histoire, il y avait une part d'intérêt et de marketing. »
« Quand elle est arrivée chez nous, en 1956, avec ses épaules larges, ses yeux charbonneux et son visage taillé à la serpe, au-dessus duquel elle avait hissé un chignon dégoulinant de mèches noir corbeau, j'ai cru que nous étions en présence d'un travelo », écrit l'ex-régisseur. Il explique que Yolanda Gigliotti chantait, à ses débuts, horriblement faux. Bruno Coquatrix ne croyait pas en elle, et son premier Olympia fut une véritable catastrophe ! Seul Lucien Morisse, le patron d'Europe 1 de l'époque, tombe sous le charme de l'Égyptienne et insiste pour la produire. Mieux, il l'épouse !
Même lorsqu'un tour de chant a été minutieusement préparé, nul n'est à l'abri d'un imprévu. Ainsi, Charles Aznavour, un soir, est entré en scène avec la braguette ouverte ; Guy Béart, avant une première, pris par une envie pressante, a uriné dans les rideaux ; Joe Dassin s'est étalé de tout son long en trébuchant sur un câble et a commencé son show à plat ventre ! Patrick Juvet, lui, a bien failli mourir en tombant à la renverse sur son piano décoré de néons qui se sont brisés autour de lui dans une gerbe d'étincelles ! Quant à Demis Roussos, si le chanteur grec n'a pas eu à affronter ce genre de soucis, Doudou nous apprend que, pour ne pas trop souffrir de la chaleur, cet homme du Sud était littéralement « à poil » sous l'immense robe qu'il portait en permanence...
Fernand Raynaud était furieusement colérique : « Par exemple, lorsqu'au premier rang un spectateur retirait le papier d'un bonbon ou mangeait une glace après l'entracte, raconte l'ancien régisseur, il n'hésitait pas à descendre dans la salle pour l'insulter. » De même, Doudou ne manque pas d'égratigner le duo Poiret-Serrault, expliquant que ces deux artistes étaient devenus inapprochables une fois parvenus au statut de vedette.
Le régisseur a travaillé de longues années avec le rocker, mais leur collaboration s'est arrêtée lors du Johnny Circus 72 . Selon Morizot, le Taulier – « Quel mec adorable !» – se laissait facilement infl uencer par ceux qui gravitaient autour de lui. « Le drame de sa vie fut son entourage, écrit-il en effet. Il a toujours été cerné de mecs douteux qui lui faisaient faire des conneries. » Ainsi, sur cette tournée de 1972, la caravane de la star était envahie chaque jour par une bande de pique-assiette : « À tel point qu'un soir, fi dèle à ses habitudes, Johnny arriva en retard et ne trouva plus de place pour se changer. Tout le monde était vautré sur les fauteuils, sur les chaises, sur le lit, en train de bouffer les œufs durs et le poulet rôti qu'ils avaient trouvé dans le frigidaire... » Dans ce désordre, la pauvre star n'avait pu dénicher le moindre petit coin pour enfi ler son habit de lumière et avait dû faire le show en tenue de ville !
« Hypocrite, vachard, envieux, jaloux des autres, il disait que la technique dans un spectacle ne sert à rien, qu'on puait la sueur et que les directeurs de salles étaient tous “des enculés". » L'artiste se plaignait fréquemment dans la presse des reports de dates de ses shows dus, selon lui, à la direction de l'Olympia. Selon Doudou, c'est « l'Amiral » qui ne cessait de repousser sa première car il ne se sentait pas prêt !
Pas tendre, Doudou lorsqu'il évoque Claude François et Thierry Le Luron ! Le premier, auquel il reconnaît beaucoup de talent, il le décrit ainsi : « Un style, une mode, une époque, une énergie, quelques danseuses à moitié nues menées à la baguette, des fi lles qui s'évanouissent dans la salle et, au centre de toute cette folie, un personnage inventé de A à Z par un petit blondinet sautillant aux velléités de dictateur. » Quant à l'humoriste, Morizot n'est pas en reste : « Sur scène, l'artiste avait beaucoup de classe, mais l'homme souffrait d'une bien mauvaise mentalité. » Selon lui, le showman insultait les techniciens, se croyait tout permis et avait pris la grosse tête.
Si Doudou Morizot réprouve sans langue de bois les travers et les tempéraments orageux de certains, en revanche, il ne tarit pas d'éloges envers les stars qui ne se sont jamais comportées comme telles. Sammy Davis Jr., humain et généreux, Ginger Rogers, accessible et chaleureuse, Jerry Lewis, gamin facétieux, mais aussi Nana Mouskouri, « la diva » timide et gentille, Annie Cordy, femme simple et artiste complète, et, bien sûr Charles Aznavour, l'ami auquel le titi parisien vouait une admiration sans borne.
Dans les années 1960, Georges Brassens souffrait de crises de coliques néphrétiques. Une douleur qui ne l'a pas empêché d'honorer ses engagements envers la direction de l'Olympia. Plusieurs soirs de suite, le chanteur au supplice était transporté en ambulance et regagnait l'hôpital ! Un calvaire... Si Jacques Brel, de son côté, a dû affronter plus tard la maladie, celle qui l'emporterait dans la tombe, ce génie des mots redoutait davantage la vieillesse que sa fi n. Au point de lancer un jour à son ami Doudou, cette boutade désespérée : « Quand je serai vieux, je serai déjà mort, alors autant mourir maintenant. Après j'aurai tout mon temps pour vieillir. »
"Malheureusement", Axelle Red fait une triste déclaration sur son mythique...
"Mon mec est dans la salle", Louane obligée de répondre en plein concert...
L'acteur Pierre Arditi s’effondre sur la scène d’un théâtre parisien en...
"Le gendarme de Saint-Tropez" : retour sur les anecdotes et les moments...