Philippe de Dieuleveult : SON FILLEUL RÉVÈLE LA VÉRITÉ SUR SA DISPARITION !

France Dimanche
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Le 6 août 1985, Philippe de Dieuleveult, l'animateur de “la Chasse aux trésors”, ne donnait plus signe de vie alors qu'il remontait le fleuve Zaïre. Un livre explosif relance l'affaire liée à ce mystère non résolu…

Trente-cinq ans après ce drame, son neveu et filleul Alexis de Dieuleveult ne se résigne toujours pas à la vérité officielle de la « mort accidentelle par noyade ». Après une contre-enquête implacable, il sort, aux éditions Balland, un livre choc intitulé Noyade d'État dans lequel il fait, documents confidentiels et inédits à l'appui, d'incroyables révélations sur cette ténébreuse affaire.

Au début de l'été 1985, Philippe de Dieuleveult est une véritable icône de la télévision. Sa grande popularité, ce descendant d'une famille bretonne la doit à une émission d'Antenne 2 : La Chasse aux trésors. L'animateur vêtu de rouge y transporte des millions de téléspectateurs aux quatre coins du monde dans un gigantesque jeu de piste, traversant en hélicoptère des contrées aux paysages époustouflants. Fou de voyages, dopé aux sensations fortes et à l'adrénaline, ce grand sportif adore particulièrement l'Afrique.

Cet été-là, il s'est lancé un nouveau défi, des plus fous : descendre en rafting, avec une dizaine de compagnons, le fleuve Zaïre sur des radeaux pneumatiques. Fin juillet 1985, un reportage du 13 heures d'Antenne 2 montre les dernières images de Philippe de Dieuleveult vivant. Torse nu, bronzé, il semble détendu et heureux. Filmé sur le lac Tanganyika, au Burundi, il présente aux téléspectateurs les bateaux de son expédition, Africa-Raft, qui consiste à remonter le cours d'eau sur 2 700 kilomètres, du lac à l'embouchure du fleuve Zaïre, sur des rafts gonflables reliés par des barres en inox et propulsés par deux puissants moteurs. « Les conditions de tournage vont être difficiles, avec l'eau. Cela ne va pas être drôle tous les jours, mais nous ferons un beau film de 52 minutes », jure-t-il.

Mais a-t-il tout dit aux téléspectateurs ? Non. Les Français ignorent que cet explorateur cache une deuxième vie : il appartient aux services secrets français, la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). Il possède même le grade de capitaine au sein d'une section spéciale d'agents surentraînés pour des missions à très hauts risques. Cette double vie n'a d'ailleurs jamais été démentie par le gouvernement français, et même confirmée, en 2006, par l'amiral Lacoste, patron de la DGSE de 1982 à septembre 1985.

Le 6 août 1985, alors que l'aventurier entre dans les redoutables rapides des barrages d'Inga, sa radio cesse soudain d'émettre. Personne ne le reverra. Selon la thèse officielle, il s'est noyé dans cette portion du fleuve réputée infranchissable.

Mais cette thèse, qui laisse à l'époque tout le monde sous le choc, Alexis de Dieuleveult n'y croit pas. Pour le filleul de l'animateur, il s'agit en réalité d'une « bavure de l'armée et des services secrets zaïrois ». Et il va même plus loin. D'après lui, l'aventurier et ses hommes auraient été arrêtés vivants sur les berges du Zaïre, puis exécutés par les membres de la division spéciale présidentielle, la sinistre DSP du président Mobutu. Dieuleveult et ses coéquipiers auraient été pris pour un commando d'élite angolais et cubain venu espionner et déstabiliser le régime du dictateur... Pensant avoir affaire à des terroristes, des soldats zaïrois auraient ouvert le feu sur les membres de l'expédition française, tuant plusieurs d'entre eux. Se rendant ensuite compte de leur méprise, ils auraient abattu la star de la télévision hexagonale... Cette théorie, Jean, le père d'Alexis et l'un des frères de Philippe, l'a échafaudée il y a déjà de nombreuses années. Dès l'annonce de la mort de l'aventurier, cet officier de l'armée française refuse de croire à une simple noyade. Quand il se rend au Zaïre pour récupérer la dépouille de son frère, il est particulièrement mal reçu par le vice-consul et l'attaché militaire. Il sent qu'on lui cache quelque chose... À sa mort en 2015, son fils Alexis, né en 1971, décide de récupérer tous les documents accumulés par son père et de reprendre l'enquête.

Bien déterminé à faire remuer les choses maintenant que le Zaïre est devenu la République démocratique du Congo, il retranscrit même dans son livre l'étrange rapport d'autopsie rédigé par un médecin légiste zaïrois que son père s'était procuré. En effet, une fois rapatrié en France, le corps présenté comme celui de Philippe est atrocement mutilé, décapité, sans pieds, ni mains, ni sexe, ni viscères.

Or, après l'autopsie menée par l'institut médico-légal de Paris, ce cadavre se révèle ne pas être celui de Philippe ! L'os du talon que l'on a voulu faire passer pour celui de l'aventurier est « typique d'une personne qui ne porte pas de chaussures, probablement un Africain », précise l'auteur de Noyade d'État. Pire, dans son livre, Alexis de Dieuleveult fait référence aux déclarations d'Okito Bene-Bene, un ex-officier des services secrets zaïrois, décédé aujourd'hui, qui affirmait en 1994 dans un ouvrage terrible (J'ai vu mourir Philippe de Dieuleveult, éd. Michel Lafon) avoir assisté à l'exécution de l'animateur.

Selon cet homme, sept membres de l'expédition auraient bien été arrêtés sur le fleuve Zaïre, puis jetés au cachot par des militaires du camp de Redjaf. Soupçonnés d'être des espions de la DGSE, ils auraient été torturés par des agents des services secrets zaïrois. D'après son témoignage glaçant, le malheureux Philippe de Dieuleveult aurait été supplicié pendant dix heures, à même le sol, à coups de ceinturons lesté de plomb. Puis, les mains attachées et les yeux bandés, il aurait été exécuté à bout portant d'une balle dans la tête. Son corps aurait été enfoui à la hâte, dans une fosse d'un village perdu, sur ordre du président Mobutu !

Entre-temps, les services secrets français, inquiets des possibles retombées diplomatiques de cette exécution, ont purement et simplement lâché leur espion... « Roland Dumas, qui était le ministre des Affaires étrangères, a préféré déguiser la vérité, affirmait Jean de Dieuleveult il y a quelques années. On a camouflé un assassinat avec torture et noyade. On vous fait reconnaître un corps méconnaissable, mutilé, sans pieds, sans mains, sans sexe, sans tête. Le dossier médical – la radio des os – prouve que ce n'était pas celui de mon frère. Au nom de la sécurité intérieure, on nous a floués, mes parents et moi, de toute vérité. »

Alexis, qui a écrit ce brûlot en guise d'hommage au combat de son papa qui s'est battu durant trente ans afin qu'éclate cette vérité, estime qu'il reste encore beaucoup de zones d'ombre. Pour aller plus loin, il lui faudrait avoir accès à des pièces du dossier toujours classées secret-défense. Il a donc adressé à Emmanuel Macron une lettre de six pages, retranscrite à la fin de Noyade d'État, dans laquelle il lui demande de déclassifier ces précieuses archives, tout en lui exposant de manière implacable ses convictions. « J'attends que le président se positionne personnellement sur cette affaire, qu'il ne botte pas en touche », confie-t-il aujourd'hui. Espérons que cette ultime requête ne reste pas lettre morte afin que toute la lumière soit enfin faite sur cette obscure et douloureuse disparition...

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Valérie EDMOND

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