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« J’ai vaincu le cancer en voulant donner la vie »

« J'ai vaincu le cancer en voulant donner la vie »

Modifié le par Import
« J'ai vaincu le cancer en voulant donner la vie »

Atteinte très jeune , elle s’est battue sans relâche pour avoir des enfants. Théotime, son petit dernier, se porte comme un charme…

« J’avais 26 ans et mon fils, Tanguy, 17 mois, quand j’ai appris que j’avais la maladie de Hodgkin ou cancer des ganglions. C’était le 18 novembre 1998, au bout de huit mois d’examens, analyses et cures d’antibiotiques. Un scanner a révélé des ganglions de 5 à 6 centimètres de diamètre, qui faisaient pression sur mes poumons. Une grosse boule dans le cou, découverte par mon kiné, a déclenché les recherches. Mononucléose, tuberculose, maladie tropicale, problème de thyroïde… J’ai tout entendu ! Et la maladie progressait.

Son stade étant avancé, j’ai débuté les traitements dans la foulée, à l’Institut Gustave Roussy. On m’a prévenue du risque de stérilité, mais je n’ai pas renoncé. J’ai subi seize séances de chimiothérapie sur un an et une radiothérapie quotidienne durant un mois. C’était épuisant. Et comme mon taux de globules blancs chutait, je devais fuir les microbes : ni lieux publics, ni dîner entre amis. Mes cheveux ont été épargnés grâce au port, très désagréable, d’un casque réfrigérant. Le 26 janvier 2000, on m’a enlevé mon cathéter implanté pour la chimio. J’étais enfin libre de gérer mon emploi du temps, de profiter de mon mari et de mon fils !

Mais en septembre 2000, nouveau coup de massue : les examens ont montré que tout n’était pas parti. La rechute. Mon mari Jean-Charles était abasourdi, désemparé, il avait peur. Il avoue aujourd’hui qu’il a failli fuir. Un soir, il avait d’ailleurs évoqué le divorce. Pourtant, malgré l’épreuve, nous sommes restés soudés, nous avons puisé notre force l’un dans l’autre.

Ségolène avec (de g. à dr.) Tanguy, Eliot, Théotime et Valentin.

J’ai alors entamé une chimiothérapie plus lourde. Mon médecin m’a informée que j’allais perdre mes cheveux, et m’a rappelé que cette méthode était stérilisante. « Il y a peu d’espoir d’avoir un autre enfant », m’a-t-on dit. C’était dur à accepter. J’avais toujours envisagé d’avoir une famille nombreuse. Une envie viscérale ! J’avais d’ailleurs pris soin de faire congeler des ovocytes avant mon premier traitement. Le nouveau consistait en quatre chimiothérapies d’une semaine, chacune suivies de 8 à 10 jours d’aplasie (NDLR : manque de production de cellules sanguines par la moelle osseuse) et de lourds effets secondaires, en hospitalisation.

Durant ces périodes, mon fils n’avait même pas le droit de me rendre visite. Les soins ont duré jusqu’en janvier 2001, et se sont achevés par une autogreffe de moelle osseuse, qui imposait une mise en chambre stérile durant plusieurs semaines. C’est alors que Tanguy, qui n’avait rien laissé paraître jusque-là, a craqué et m’a demandé au téléphone « Encore combien de jours, Maman ? »*, titre de mon livre. Heureusement, mon isolement n’a duré que trois semaines. J’ai enfin pu prendre mon fils à nouveau dans les bras, le câliner, être une maman comme les autres, et revivre aux côtés de mon mari, qui a ensuite connu un état dépressif.

En septembre 2001, bonne nouvelle : je suis en rémission. Les médecins me donnent leur accord pour mettre un bébé en route, sans trop y croire. Au fond de moi, je sentais que je serais encore maman. Le 31 décembre 2001, j’apprends que je suis enceinte, et Valentin naît le 15 août 2002. J’avais 30 ans. Dix mois plus tard, j’apprends que j’attends notre troisième enfant : Eliot voit le jour le 8 mars 2004. Pour agrandir encore notre famille, j’ai dû recourir à des stimulations hormonales. Alors que j’allais cesser les traitements, faute de résultats, nous avons découvert que j’étais à nouveau enceinte. Notre petit Théotime a poussé son premier cri le 13 décembre 2007.

J’ai voulu écrire pour me soulager et transmettre cette histoire à nos enfants. Ce livre est là pour ceux qui souffrent, pour qu’on ne les ignore pas. Je tenais à expliquer les douleurs intimes en tant que malade, au-delà de celles, physiques, qu’imposent les traitements : les maladresses de l’entourage, les quiproquos… Aujourd’hui, j’ai crevé l’abcès. J’ai eu la chance de m’en sortir, je dois partager mon expérience.

Une voisine de chambre m’a d’ailleurs dit un jour : « Il faudra écrire pour nous tous, car dehors ils ne savent rien. » Rien de notre souffrance, rien sur l’emprisonnement dans la maladie et à l’hôpital que l’on peut éprouver. J’ai aussi et surtout écrit ce livre pour remercier mon mari et tous ceux qui m’ont accompagnée durant ces années, notamment à l’Institut Gustave Roussy, et pour faire ressentir la joie de vivre au-delà de la douleur. Car grâce à cette envie de vivre et à celle d’avoir des enfants, je ne me suis, à aucun moment, sentie concernée par la mort, même si je l’ai frôlée. »

* « Encore combien de jours, Maman ? » de Ségolène de Margerie, aux éditions Jacob-Duvernet, 20 € TTC.

Propos recueilli par Florence Heimburger

Écrit par Import

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