« Je pesais presque 300 kilos... »

France Dimanche
« Je pesais presque 300 kilos... »

Ses jambes ne pouvant plus supporter son poids, cet homme est comme emprisonné dans son corps. Son seul espoir : être admis dans un centre spécialisé qui pourrait le sauver.

« Je n'ai jamais été un gringalet, pesant toujours autour de 100 kg, c'est ma nature. Mais en 2005, à la suite d'un AVC, mon surpoids s'est transformé en obésité car, pour me soigner, j'ai été obligé de prendre de nombreux médicaments qui font énormément grossir. En quelques années, j'ai pris plus de 150 kg, malgré mes multiples régimes. Et en 2005, j'ai presque atteint les trois quintaux (300 kg, ndlr) ! C'était un vrai supplice : je voyais mon corps se transformer peu à peu en un énorme réservoir de graisse !

Heureusement, j'avais encore des jambes solides qui réussissaient tant bien que mal à me porter. Je parvenais à me lever de mon lit et à marcher dans mon appartement pour me faire à manger, m'aérer sur mon balcon, m'asseoir sur mon fauteuil pour regarder la télévision. Je pouvais même faire quelques pas dans le jardin, le temps que mon berger allemand, Crocs-Blancs, fasse sa balade quotidienne. Bref, mes mouvements étaient limités, mais j'étais encore autonome, ce qui m'empêchait de sombrer dans la dépression !

Hélas, ce fragile équilibre a été rompu ! En avril dernier, j'ai fait un gros malaise respiratoire et j'ai été hospitalisé d'urgence. Ce fut le début d'un véritable cauchemar ! Au lieu de prendre soin de moi, les membres du personnel m'ont traité comme un chien ! Pour commencer, ils m'ont installé dans un lit bloqué tellement haut que je ne pouvais pas en descendre seul, à cause de mon poids. “On va voir avec le directeur pour vous le changer“, n'arrêtaient-ils pas de me répondre. Mais j'ai attendu et attendu encore, pendant 7 mois : en vain.

Résultat, pendant tout mon séjour, je n'ai à aucun moment pu me lever de mon lit et me mettre debout. Mes jambes ont alors perdu tous leurs muscles et sont devenues deux “quilles“ sans force ! À plusieurs reprises, j'ai pourtant alerté les médecins : “Je n'arrive plus à marcher : il faut que vous me fassiez admettre dans un centre spécialisé où je pourrai faire retravailler mes jambes.“  Hélas, on  m'a fait espérer qu'un établissement de rééducation allait m'accueillir mais, au final, je n'ai pas bougé de ma chambre !

Et s'il n'y avait que ça ! Pendant toute mon hospitalisation, le personnel ne m'a lavé la tête qu'une seule fois ! Ma toilette quotidienne ne durait que quelques minutes ! Et quand je voulais faire mes besoins, j'étais parfois contraint d'attendre des heures qu'un aide-soignant vienne me mettre en position stable et tienne mon bassinet. Résultat : je me suis parfois fait dessus, et c'est terriblement humiliant.

Au-delà de tous ces mauvais traitements, le plus grave demeure l'état de mes jambes. En novembre dernier, on m'a renvoyé chez moi : les médecins avaient réussi à me faire perdre près de 100 kg, et je les en remercie. Ils ont alors estimé que leur mission était terminée !

Mais entre-temps, mon séjour avait fait de moi un véritable infirme, incapable de marcher ! J'ai eu beau me plaindre, rien n'y a fait ! Aujourd'hui, je suis bloqué dans mon lit depuis plus de deux mois, et mon état de santé continue de se dégrader. À force de rester couché, ma colonne vertébrale me fait souffrir le martyre, et comme mon transit intestinal est déréglé, je souffre en permanence des crampes abdominales insoutenables. Sans parler de l'ennui qui me mine au quotidien, puisque je ne fais rien de mes journées !

Heureusement que j'ai quelques voisins bienveillants et des infirmiers qui me rendent visite pour me faire à manger, me prodiguer quelques soins et sortir Crocs-Blancs. J'aime ce chien plus que tout. S'il n'était pas à mes côtés, il y a longtemps que j'aurais mis fin à mes jours, pour que mon calvaire cesse enfin. Je dois rejoindre un établissement spécialisé, il en va de ma vie !"

Propos recueilli par Thierry Lopez

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