"Vivez, avant qu'une “saleté“ ne vous tombe dessus ! »

France Dimanche
"Vivez, avant qu'une “saleté“ ne vous tombe dessus ! »

« Le 30 juillet 2006, alors que nous revenons de vacances avec mon mari et mes deux filles, je me découvre une boule au sein. Tout de suite, c'est l'angoisse. Ma mère a eu un cancer en 1983. Elle en est morte en 1993 après dix ans de galères. Je vais à l'hôpital, mais on ne peut pas me recevoir faute de rendez-vous. Ce n'est qu'après six semaines qu'on m'annonce que j'ai un cancer du sein. J'avais un doute, je le sentais. Pourtant, le mois d'avril précédent, j'avais passé une mammographie, et ça allait.

À ce moment-là, j'ai 47 ans et je me sens larguée. C'est le tsunami dans ma famille. Je me dis que, comme ma mère, je vais mourir du crabe. Je revis la même chose, j'ai l'impression d'être ma mère. C'est comme vivre deux cancers en même temps. Je rentre alors dans le cycle traitements, chimiothérapie, perte de cheveux... Mais la souffrance psychologique est la plus forte. Tous mes soucis personnels me reviennent d'un coup. Quand on est malade, les trucs pas réglés resurgissent. Après un an de lutte et une opération pour enlever la tumeur, j'ai commencé à aller mieux.

Mais j'ai compris que je devais changer ma vie pour éviter un retour du cancer. Je suis persuadée que cette maladie est née de tout le stress accumulé pendant les vingt-cinq ans qui ont précédé. Un accident de la route à 20 ans, la mort de ma mère, les efforts accumulés pour réussir ma vie professionnelle... Avant la maladie, j'étais accro au boulot. C'était même ma priorité. J'avais monté mon institut de beauté, je donnais des cours, j'étais représentante, je visitais des hôpitaux. Je ne savais pas dire non, j'acceptais tout.

Le vendredi, je donnais quatre heures de cours de danse bénévolement. Le bénéfice des spectacles offrait des vacances aux enfants cancéreux, accompagnés par une équipe médicale. Donner ces cours était pour moi une façon de faire le deuil de maman. Ajoutez à cela, les courses du samedi et vous comprendrez que, le dimanche, j'étais sur les genoux. En fait, je m'épuisais.

Depuis ma sortie de l'hôpital, j'ai changé mes habitudes. Ma famille est devenu prioritaire, plus que le boulot. Maintenant, l'amour des miens, leur santé, la mienne passent avant tout. Je n'hésite plus à me reposer quand j'en ressens le besoin. J'ai aussi changé mes habitudes alimentaires en passant au régime crétois. Ce cancer a tout remis en question. On a tous un potentiel négatif en nous. Avec, en plus, l'héritage génétique de ma mère, cela a fait un cocktail explosif. Je ne veux plus être l'alliée du stress. Mes filles de 20 et 25 ans ont aussi changé. Elles se surveillent. L'aînée mange plus bio, est plus sportive. Elles ont été très fortes pendant ma maladie. Avec mon mari, Lou, on était tous dans le même bateau. Après ma guérison, ils ont attrapé de petites infections par contrecoup.

Aujourd'hui, je suis en rémission. Mais je me considère toujours en plein combat. Je prends encore des médicaments, et je passe des examens régulièrement. Mon chirurgien est optimiste. J'ai commencé à écrire mon livre quand j'étais à l'hôpital. J'ai pris pour pseudo Klairet, le surnom que me donnait, petite, une institutrice morte d'un cancer depuis. Écrire était un exutoire utile. Je l'ai fait pour mes filles aussi. J'ai reçu l'aide de Marylène Bergmann, une présentatrice de télévision très connue en Lorraine et en Belgique. Elle a accepté d'écrire ma préface, et je l'en remercie beaucoup.

J'ai reçu beaucoup de courriers de lecteurs malades ou pas. Ils me disent : “Vous exprimez ce que je n'arrivais pas à exprimer“. Les gens en bonne santé me disent que “Plus heureuse qu'avant mon cancer !“ leur a mis un coup de pied au cul. Si le “crabe“ me fout la paix, je lui dirai merci de m'avoir ouvert les yeux. Mon message est simple. Vivez avant qu'une saleté arrive. Réalisez vos rêves avant la retraite. Croyez-moi, on a en soi des ressources insoupçonnées. »

"Plus heureuse qu'avant mon cancer !" de Klairet S., aux Editions Édilivre, 17 €.
Message à Claire : adressez-le à :  www.edilivre.com

Propos recueilli par Benoît Franquebalme

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